Confédération Générale du Logement du Val-De-Marne

EXPULSIONS – LES BAILLEURS S’ACTIVENT

A moins de trois mois du début de la trêve hivernale, les bailleurs, sociaux comme privés, sont actuellement en train de relancer huissiers de justice et Préfecture afin de faire libérer les logements occupés par des personnes expulsables en vertu d’une décision de justice.

 

L’expulsion, archaïsme du droit français, est certes souvent la seule alternative possible pour les petits bailleurs privés ayant un besoin impérieux de récupérer leur bien, mais il ne peut être toléré qu’aucune solution, aucune aide au relogement ne soit mise en place pour les personnes mises à la porte de leur logement de force.

 

En secteur social, le constat est le même : accélération des expulsions pendant la période estivale. Nous sommes actuellement confrontés à des drames humains de locataires nous appelant à l’aide. Faisons donc le point sur les démarches à effectuer pour cerner la situation de ces personnes et tenter de trouver une issue pour ces cas.

 

Nous ne traiterons ici que les cas d’expulsions rencontrés en HLM. En effet, si le droit commun admet l’expulsion suite à un congé pour reprise, vente, ou motif légitime et sérieux, délivré par le bailleur, ainsi qu’après une résiliation du contrat de location pour manquement à une obligation contractuelle, le droit des baux d’habitation en secteur social, lui, circonscrit les possibilités de fin de contrat à quelques cas.

 

En secteur social, le droit au maintien dans les lieux, issu de la loi de 1948, empêche les bailleurs de donner congé comme peuvent le faire les bailleurs privés. Cependant, ce droit peut être perdu par les locataires dans les cas suivants :

Quand l’immeuble est voué à une démolition ou à des travaux d’une telle importance que son maintien dans l’appartement loué serait inenvisageable ; une proposition de relogement doit évidemment être émise par le bailleur social ;

En cas de sous-occupation du bien, c’est-à-dire lorsque le locataire vit dans un bien trop grand par rapport au nombre de personnes vivant effectivement sous son toit. Un locataire vivant seul dans un appartement de quatre pièces, notamment après le départ de ses enfants, peut alors se voir opposer cette sous-occupation par son bailleur et subir une non-reconduction de son bail. Là encore une proposition de relogement dans un bien de taille plus adaptée doit être formulée par le bailleur.

En outre, le droit au maintien dans les lieux peut être remis en cause pour un locataire dont les revenus dépassent les plafonds permettant l’accès au parc social.

 

Par ailleurs, un manquement à une obligation contractuelle par le locataire, tels le défaut de paiement du loyer, des charges, la génération d’un trouble grave de jouissance, autorise les bailleurs sociaux à mettre fin au bail en cours et à obtenir devant le juge d’Instance l’expulsion des locataires.

 

Une fois la cause de l’expulsion identifiée, on doit étudier et vérifier les démarches effectuées par le locataire ou par le bailleur pour trouver une solution. Et il faut se poser les bonnes questions :

 

Tout d’abord, le locataire a-t-il enregistré une nouvelle demande de logement social auprès de sa mairie ou du service du logement dont il dépend ? Sinon, il faut l’inviter à le faire au plus vite.

S’il est salarié, le locataire a-t-il sollicité le bénéfice de l’Action logement (ancien 1% logement) auprès de son employeur ?

 

Dans les cas précités qui imposent au bailleur de proposer un nouveau logement, un relogement a-t-il bien été proposé? Pourquoi le locataire n’est-il pas installé dans ce nouveau logement ?

 

Dans les cas d’impayés de loyer, quel est le montant de la dette locative ? Le locataire a-t-il d’autres dettes par ailleurs ? Si la dette locative est importante ou que celle-ci se cumule avec d’autres, par exemple issues de crédits à la consommation, de prêts bancaires, alors la mise en place d’un dossier de surendettement doit être envisagée rapidement. La CGL94 peut aiguiller les locataires en difficulté dans ce type de dossier.

 

Par ailleurs, il est important que le locataire reprenne au minimum le paiement des indemnités d’occupation courantes.

Pourquoi reprendre ces paiements alors que l’on est expulsable ?

D’une part, il faut bien garder à l’esprit que la dette suit son débiteur, même au-delà de l’expulsion. Il faudra donc s’en acquitter quoi qu’il arrive. D’autre part, la reprise du versement de ces indemnités peut non-seulement aboutir à l’allocation d’une aide financière accordée par le Fonds de Solidarité Habitat, dit « FSH » (dans le Val-de-Marne), mais surtout à la mise en place d’un protocole d’accord avec le bailleur, généralement sur une durée de deux ans, avec à la clef la possible conclusion d’un nouveau contrat de location pour le même logement.

 

Une fois listées les démarches effectuées par le locataire pour tenter de se sortir de cette situation d’expulsion,  des procédures impératives doivent être engagées.

 

La saisine du Juge de l’exécution

 

Dès la réception du commandement de quitter les lieux par voie d’huissier, souvent appelé « avis d’expulsion », le locataire doit saisir le Juge de l’exécution près le Tribunal de Grande Instance de Créteil afin d’obtenir un délai avant l’expulsion, lui permettant de se maintenir dans les lieux, de quelques mois à un an, et d’entamer les démarches nécessaires à son relogement.

Attention ! Ce juge n’a pas le pouvoir d’annuler l’expulsion, ni de remettre en cause la résiliation du bail. De même, la simple saisine de ce juge ne suspend aucunement la procédure d’expulsion en cours : ainsi, jusqu’au jour de l’audience, l’expulsion manu militari peut théoriquement avoir lieu.

 

Le dossier DALO

 

Si le locataire expulsable a bien enregistré une demande de logement social comme précédemment évoqué, condition préalable et impérative imposée par le Décret N°2014-116 du 11 février 2014, alors il doit faire son droit au logement opposable en saisissant la commission de médiation par le biais d’un dossier DALO à remplir et à envoyer en recommandé avec accusé de réception, accompagné de tous les justificatifs requis.

Une fois reconnu prioritaire, le locataire devra se voir proposer un relogement, la Préfecture y étant contrainte. La reconnaissance de ce caractère prioritaire permet également de neutraliser les effets de la procédure d’expulsion en cours sur le logement occupé : en théorie, il est impossible d’expulser par la force un occupant par ailleurs reconnu prioritaire au titre du DALO.

 

Le droit à l’hébergement opposable

 

Parallèlement au dossier DALO, si le locataire n’a aucune perspective de relogement, et qu’aucun proche ne peut lui offrir d’hébergement, il lui faut se tourner vers le Service intégré de l’accueil et de l’orientation (SIAO) afin d’effectuer les démarches nécessaires pour obtenir un hébergement temporaire, en structure hôtelière, la plupart du temps.

Une fois ces démarches lancées, il est possible de constituer un dossier DAHO, droit à l’hébergement opposable, de saisir ainsi la commission de médiation, sur le même principe que le dossier DALO précité, afin de se voir reconnaître prioritaire à l’hébergement.

 

 

Comme nous le voyons, de nombreuses pistes peuvent être envisagées dans le cas d’une procédure d’expulsion. La CGL94 et ses amicales affiliées sont à l’écoute de ces situations et y apportent tout leur appui, leur soutien, tant technique qu’humain. Le principal est de réagir vite, de ne pas laisser le temps s’écouler inutilement, la stratégie de l’évitement étant inefficace et dangereuse. En effet, l CGL94 se trouve frustrée et inopérante face à un locataire au pied du mur, qui nous sollicite seulement le jour où l’huissier accompagné de la force publique frappent à sa porte.